← Synthèse de l'état des connaissances à propos de l'administration sous-cutanée des antibiotiques
Contexte
La voie sous-cutanée peut être utile en cas d’impossibilité d’utiliser une autre voie d’abord (intraveineuse, intramusculaire ou orale) pour traiter une infection ne nécessitant pas une antibiothérapie massive et rapide. Cette voie est peu documentée et ne fait habituellement pas l’objet de recommandations dans le résumé des caractéristiques du produit (RCP). L'EMA vous propose une synthèse de l'état des connaissances sur l'administration des antibiotiques par voie sous-cutanée. L'usage sous-cutané hors AMM d'un antibiotique doit être tracé dans le dossier médical du patient en mentionnant l'évaluation du rapport bénéfice/risque.
Ceftriaxone (Rocephine*) par voie sous-cutanée
Ce que dit le RCP
Le résumé des caractéristiques du produit (RCP) précise que la ceftriaxone est utilisable par voie intraveineuse ou intramusculaire. La voie sous-cutanée n'est pas proposée dans le RCP.
Administration sous-cutanée hors RCP
L'agence de sécurité des médicaments (ansm) précise "En l’absence de
données d’efficacité suffisantes pour justifier une administration par
voie sous-cutanée (SC),
l’Agence Européenne des Médicaments (EMA) a décidé fin 2014 de
restreindre l’administration des spécialités à base
de ceftriaxone aux voies intraveineuse (IV) et intramusculaire (IM).
Néanmoins dans certaines situations, le clinicien peut juger
indispensable l’administration de la ceftriaxone par voie
sous-cutanée au regard du rapport bénéfice/risque pour son patient et
sous réserve d’en informer ce dernier ou sa
famille.
Pour rappel, lors de l’utilisation des antibiotiques par voie
sous-cutanée, des effets indésirables peuvent survenir. Ce
sont essentiellement des réactions au site d’injection, de type
érythème, rash, douleurs, œdèmes ou dans de rares
cas, des nécroses."
Le développement initial par le laboratoire Roche avait validé que le pic de concentration
initiale est plus bas par voie sous-cutanée mais que l'aire sous courbe
qui traduit l'efficacité de cette bêtalactamine reste équivalente.
A l’époque, était proposé l’usage du solvant à la lidocaïne en
sous-cutanée directe en respectant scrupuleusement les
contre-indications à la lidocaïne (allergie, arythmie, jeune enfant...).
L'injection directe sous-cutanée avec lidocaïne est dorénavant
déconseillée.
Depuis le développement initial, il a été démontré que le risque d'effet indésirable local est augmenté par
- l'usage d'un cathéter inadapté,
- la présence de lidocaïne,
- une concentration d'antibiotique trop élevée,
- une injection trop rapide.
En pratique,
et seulement quand la voie intraveineuse ou intramusculaire est impossible,
il convient d'utiliser la ceftriaxone par voie sous-cutanée avec prudence
-
en respectant les contre-indications de la voie sous-cutanée : infection grave (sepsis, choc septique, endocardite à la phase aiguë) ou tissu sous-cutané dégradé par une infection locale, une éruption, un hématome,
- en solubilisant la poudre à raison de 1g par 10mL d'eau-ppi ou chlorure de sodium 0,9%,
- en diluant ensuite suffisamment la solution
concentrée 1g/10mL, par exemple dans une poche de 50ml ou
100mL de chlorure de sodium 0,9%,
- en utilisant un cathéter souple de petit diamètre, habituellement 22G (0,9mm) ou 24G (0,7mm),
- sous pansement
hypoallergénique transparent semi-perméable,
- en administrant lentement la solution diluée, par exemple en perfusion sous-cutanée de 30 à 60 minutes,
- en surveillant bien
le site d'injection et en changeant de site à chaque injection, préférentiellement dans la cuisse ou
l'abdomen.
Le solvant à la xylocaïne n'est pas utilisé pour une administration en perfusion sous-cutanée.
Autres antibiotiques utilisés par voie sous-cutanée
En respectant les mêmes principes que pour la ceftriaxone (dilution suffisante, changement systématique du site d’injection, etc.), d'autres antibiotiques sont dorénavant administrés en perfusion sous-cutanée avec un recul d’expérience admis suffisant :
- ertapénem (Invanz*),
- Teicoplanine (Targocid*).
Sont également utilisés sans inconvénient identifié mais avec un recul clinique moindre
- céfépime (anciennement Axepim*),
- ceftazidime (Fortum*).
Antibiotiques à ne jamais utiliser par voie sous-cutanée
Certains antibiotiques NE doivent PAS être utilisés par voie sous-cutanée.
Un aminoside (sont commercialisés en France amikacine, gentamicine et tobramycine) par voie sous-cutanée risquerait de ne pas atteindre une valeur suffisante de pic de concentration garant de l’efficacité. De plus, la tolérance locale des aminosides est médiocre.
Céfuroxime (Zinnat*), oxacilline (Orbenine*), vancomycine sont identifiés comme responsables d’une toxicité endothéliale qui interdit leur usage sous-cutané.